Le
travail du bois au Maroc
Au Maroc, le travail du bois a une longue
histoire. En témoignent, à Fès, les portes aux gravures
complexes de l'ancienne Madersa Bou Inania ainsi que les balcons
en cèdre richement ornés du Foundouk Nejjarine. Le Foundouk
Nejjarine, récemment restauré, expose d'ailleurs des bois
marocains, des outils et des techniques d'ébénisterie ainsi
que des antiquités - une collection splendide qui vaut largement
la visite. Des meubles marocains séculaires ornent également,
dans les médinas du pays, des milliers de riads et de dars.
Particulièrement prisés, ils sont le lieu de séjour d'un
nombre grandissant de touristes.
Le bois le plus précieux et le plus onéreux des forêts du
Maroc est le cèdre. Au cours des siècles, le cèdre a servi à
la confection de portes, de balcons, de meubles et de plafonds.
Actuellement, on le rencontre surtout dans la région du Moyen
Atlas, aux alentours de Fès, Azrou et Khénifra. Mais son
utilisation se répand assurément dans les maisons raffinées du
reste du pays. Un passage dans les forêts de cèdre du Moyen
Atlas confirme son prestige au sein de la société marocaine.
Ces arbres élancés du bois clair occupent une place
privilégiée dans le coeur de tous ceux qui s'asseyent dans
leurs amples branches ou qui apprécient leur parfum et leur
texture pour leur ameublement intérieur. Ces forêts sont
également le domaine des fameux macaques de barbarie du Maroc,
qui aiment, perchés en haut de leur cèdre, regarder passer les
promeneurs. Le noyer, un bois aux belles ondulations noires,
brunes et fauves, provient principalement des alentours d'Amizmiz,
un village berbère du sud de Marrakech lové au pied des
impressionnantes montagnes du Haut Atlas. s'il est moins connu
que le cèdre, le noyer est néanmoins apprécié par es artisans
pour sa résistance et sa couleur, idéalement adaptées à la
confection de tables, chaises, tabourets et autres objets
fonctionnels en bois. Cet arbre offre également des noix
savoureuses vendues dans de grandes jarres en verre dans les
hauts de tout le Maroc.
Le thuya, avec sa couleur rouge-brun absolument remarquable et
son grain "en oeil d'oiseau" est très fréquemment
associé à l'artisanat du bois au Maroc. De petits objets faits
main en thuya sont proposés dans les boutiques, souks et
médinas de tout le pays. Les touristes apprécient tout
particulièrement ces articles, parfaits à offrir. Les thuyas
poussent non loin d'Essaouira et d'Agadir, leur mode de
récolte permet d'utiliser l'arbre entier, son tronc y compris.
Chaque partie du thuya présente en effet des caractéristiques
uniques. Les forêts de thuya au Maroc accusent aujourd'hui des
signes de surexploitation. Bien qu'il s'agisse d'un bois d'une
très grande beauté, cette situation est particulièrement
problématique car la subsistance de nombreux artisans implanté
au sud du pays, à proximité de la cote atlantique, dépend de
cette ressource. Une collaboration prolongée entre le
gouvernement, les groupes environnementaux et les artisans qui
utilisent le thuya pourra garantir un usage durable de ce bois,
et permettre aux générations futures de profiter encore de ses
nombreuses qualités.
De fait, cette collaboration est déjà mise en oeuvre de
nombreux villages dispersés le long du paysage escarpé qui
traverse en diagonale la partie est du Maroc. Nichées dans les
montagnes du Haut Atlas, les communautés s'organisent pour
planter ensemble des pépinières. Leur action exemplaire
illustre les efforts locaux destinés à promouvoir l'exploitation
durable des ressources naturelles. De nombreux villages du Maroc,
très reculés, longent les dix parcs nationaux du pays. Le
gouvernement marocain et des ONG locales ont récemment consacré
leurs efforts à la création de projets socio-économiques et
environnementaux dont l'objectif est d'aider ces communautés
à préserver, et dans de nombreux cas, à reconstituer ces
ressources naturelles révérées. Le gouvernement a lancé un
plan de reforestation nationale dont le but est de rendre son
vert émeraude d'origine au paysage désormais clairsemé du
pays, et ce en l'espace de vingt ans.
Dans la lointaine vallée Tifnoute - sur le versant sud du sommet
le plus élevé d'Afrique du Nord, le Mont Toubkal - la vie s'écoule
à un rythme moins effréné que dans la bouillonnante ville de
Marrakech, située à une journée de route. Voisins du Parc
National Toubkal, les habitants qui peuplent cette vallée ont
compris le rôle, crucial qu'ils ont à jouer dans la protection
des ressources naturelles du parc.
En 2007, ils plantèrent une pépinière de 60 000 arbres
fruitiers afin de reconstituer les terrasses dégarnies de la
vallée. Deux années plus tard, (le temps nécessaire à une
maturation suffisante) près de 20 000 arbres furent distribués
à 250 foyers - cette action généra une amélioration des
moyens de subsistance de ces communauté de cultivateurs. La
reforestation offre des avantages nombreux et exceptionnels -
elle renforce l'environnement, prévient l'érosion des sols et
la désertification tout en créant de nouvelles terrasses
agricoles. La reforestation par arbres fruitiers à l'avantage
supplémentaire de doubler les revenus des ménages grâce à la
vente des fruits sur les marchés locaux, contribuant à la mise
en valeur des économies rurales. Dans le sillage de ce projet
réussi, trois pépinières supplémentaires ont été prévues
pour les communautés voisines du Parc National Toubkal durant la
saison de plantation 2009-2010. Elles comprendront notamment des
pépinières de noyers. Ces arbres naturellement présents dans
la région n'ont pas besoin de pesticides, consomment moins d'eau
que d'autres arbres et sont adaptés à de multiples usages.
Leur bois sert à fabriquer de beaux meubles (les branches mortes
ou coupées peuvent également s'utiliser pour de plus petits
objets artisanaux) leur noix a une valeur très élevée, enfin,
leur écorce et leur racine peuvent être vendues sur des
marchés de plantes traditionnels.
Ces pépinières innovantes sont nées d'une collaboration
réunissant le Haut Commissariat pour les Eaux et Forêts, en
charge des parcs nationaux du pays, la Fondation du Haut Atlas,
une ONG américano-marocaine engagée dans la promotion du
développement durable auprès des communautés rurales et enfin
de nombreux individus et entreprises qui fournissent les fonds
nécessaires à ces projets importants. Le choix de pratiques qui
privilégient l'exploitation durable des forêts du Maroc assure
aux métiers de l'artisanat marocain un futur éclatant, car de
nombreux bois marocains sont prisés pour leur caractère. Mais
dans les artisanats marocains, la beauté du matériau ne
constitue qu'une partie de l'histoire. Toute aussi important
est l'habileté des artisans marocains - leur tour de main
confère à chaque pièce un caractère unique. Ceux qui
travaillent le bois au Maroc, sont, dans leur grande majorité,
des artistes aguerris dont les mains burinées et le regard
affûté prouvent que leurs articles ont véritablement été
réalisés de manière artisanale. Dans tout le Maroc résonnent
les sons si distinctifs des artisans au travail: le "tap-tap-tap"
des outils du graveur, le frottement répétitif du ponçage, le
crissement des scies et enfin les "saaafi!" prolongés
lancés à la conclusion d'une vente.
La gravure est l'un des aspects les plus intéressants de l'ébénisterie
marocaine. Des motifs floraux, des formes géométriques, des
incrustations d'ivoire et de cuivre ornent souvent le bois,
suivant des dessins hérités de nombreuses influences anciennes,
andalouses, arabes et berbères. Bien que de nombreux artisans
continuent à utiliser des gravures et dessins traditionnels, d'autres
ont tendance à suivre une tendance plus moderne,
particulièrement dans les villes comme Casablanca et Rabat où l'influence
européenne est plus forte. La tradition marocaine, la modernité,
ou un mélange des deux: c'est ce que de nombreux visiteurs
découvrent lorsqu' ils viennent parcourir le Maroc ou y vivre.
Ce pays unique peut s'enorgueillir de réunir les meilleurs
aspects du monde médiéval et de la vie moderne. Tel est
réellement le Maroc: vous pourrez, le temps d'une nuit,
profiter de l'élégance d'un riad au coeur de la médina, pour
loger la nuit suivante dans un hôtel spacieux du front de mer,
vous pourrez le temps d'un déjeuner, déguster à Marrakech un
tajine lentement mijoté pour savourer le soir venu des sushis
frais à Casablanca. Dans ce pays, vous pourrez entendre le
ciseau du graveur travaillant un meuble marocain traditionnel
dans une rue et passer, dans la rue voisine par une galerie de
design moderne. Mais en chemin, n'oubliez pas de faire une pause
et pour humer le parfum du cèdre.